« Si nous venions à disparaître, défendez nos mémoires » Didouche Mourad
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Bouridah Seddik dit Bachir Lakehal
Martyrs
Bounar Rachid dit Si Rachid
17 octobre 1932 - 10 janvier 1959
1942, voila une année déterminante pour le chahid Bounar Rachid. Des mois et des jours durant, les forces allemandes bombardaient incessamment la région de Jijel, suite au débarquement des alliés sur les côtes algériennes. Les populations jijeliennes vivaient alors des moments difficiles entre les risques de rester sur place avec des conséquences qui peuvent s'avérer désastreuses ou bien prendre l'exode en direction des montagnes : c'était la fameuse « Harba » .
Voici son histoire
À l'âge de sept ans, Bounar Rachid est scolarisé à l'école primaire du « Fondouk »1 puis transféré à celle de Jean Jaurès 2. Le 13 novembre 1942, quand un bataillon anglais prit ses quartiers dans la région de Jijel, il rompit définitivement avec les bancs de l'école. Il venait de perdre précocement sa mère Houria et n'avait alors que dix ans. Pour ses amis, Bounar Rachid est le premier enfant de son père Bachir et de sa mère Lagha. Sa famille est originaire du village de Ouled Bounar, 5 km à l'ouest de Jijel, mais lui naquit à Béjaïa (Bougie) le 17 octobre 1932. Il était l'aîné de cinq garçons et trois filles. Ces circonstances douloureuses pour un jeune enfant vont être décisives par la suite lorsqu'il prit conscience, comme d'autres algériens, de l'intenable réalité du vécu de ses compatriotes et de son peuple. La vie lui était devenue désagréable et insoutenable. Misère et amertume comme le supporterait la grande masse algérienne. Durant ces durs moments, sa personnalité se muait en grand bouleversement, qui de la condition à la politique, l'avait contrainte à traverser en courant et rapidement, le trajet qui mène de l'insouciance vers la sensibilité, de l'ignorance vers la conscience du jeune. Son destin allait complètement changé. Devenu orphelin de père et de mère, il résolu de quitter son village natal pour rallier la capitale Alger, en emportant avec lui plus de douleurs que d'espoir. Là, il connut la grande galère, sans soutien et sans domicile fixe. La lecture de la vie de ses compatriotes lui prouva que ces souffrances étaient d'une façon engendrées par le système coercitif et injuste de l'occupant colonialiste. Face à cette situation insupportable, sa vision des choses changea complètement et il se mit à rencontrer ses semblables, qui de jour en jour lui permirent de s'affermir à l'idée de la cause nationaliste, de plus en plus manifeste au début des années 1950. Au déclenchement de la lutte armée en 1954, le jeune Rachid était déjà incorporé dans les rangs de l'armée française et affecté à la caserne Ali Khodja (ex-caserne d'Orléans). Une forte indignation empressa son patriotisme et tout lui était devenu insoutenable, au point de n'avoir qu'une seule idée en tête, déserter de l'armée française. Ce qu'il fit quelques semaines plus tard en entrant dans la clandestinité. Devenu fugitif, il est notamment recherché par la police militaire française puis condamné à la peine capitale par contumace en 1955 par le tribunal d'Alger. Comprenant de plus en plus que sa tâche est à côté du mouvement révolutionnaire naissant, il quitta Alger en 1957 pour aller rejoindre les maquis de Djidjelli. C'est dans une camionnette chargée de caisses de fruits et légumes, qu'il s'embarqua en direction de la Petite Kabylie ; il était dissimulé à l'intérieur d'un réduit fait de cageots et autre bric à brac. Cette vulnérable cachette lui permit néanmoins de traverser les multiples barrages militaires qui jalonnaient le long et périlleux trajet de 380 km. Arrivé miraculeusement à son village natal, il prit contact avec les moudjahiddine de la région qui lui étaient proches et « monta à la montagne ». Sergent-chef de l'armée de libération nationale (ALN), Si Rachid, comme le désignait ses amis de combat, participa avec bravoure à plusieurs combats et batailles principalement dans les monts Babors. Derrière l'esprit et le courage du Chahid Bounar se cachait une timidité et une générosité étonnante. Sa bonne conduite et son exemplaire sérieux ont toujours accompagné son courage et son dynamisme dans la lutte armée. Lui qui avait toujours soutenu, pressé par ses amis de se marier, qu'il ne le ferait que lorsque son pays accéderait à l'indépendance. Il avait rempli plusieurs missions très risquées et au cours de l'une d'elle, celle du 10 janvier 1959, il s'accrocha lui et son groupe avec l'armée française dans les hautes montagnes des Babors à la frontière des régions de Djidjelli et Bougie près de mechta Bougherda. Après une lutte acharnée, Si Rachid fut mortellement blessé et succomba le jour même tard dans la nuit. Le martyr venait de rejoindre le lot des sacrifiés de l'Algérie libre. Son serment prononcé quelques années plutôt, ne fut point dénué de transcendance. Finalement, « il venait d'épouser pour l'éternité la terre de ses ancêtres » : Corps et Âme. Karim Hadji jijel-archeo Mémorial