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Digest de la presse algérienne sur les questions de l'archéologie, de l'histoire, de l'environnement et de l'écologie...
La bibliothèque romaine de Timgad, de l’antique cité Thamugadi ( 35 km à l’est de la ville de Batna), demeure sans conteste un des plus anciens lieux de savoir et de connaissances au monde et l’un des mieux conservés dans toute l’Afrique du nord, selon les archéologues. Avec ses 25 mètres de long sur 23,5 mètres de large, cet établissement culturel (une bibliothèque publique), devait être très impressionnant, notent-ils.
Bien que méconnu des citoyens, il composait avec le
célèbre théâtre qui lui est
attenant et le forum, les trois principaux édifices du
centre ville de l’antique Timgad. Rompant avec les formes
rectangulaires des autres bibliothèques romaines, celle de
Timgad se particularise par sa salle de lecture semi-circulaire avec
ses 12 mètres de diamètre et les
décorations de ses mosaïques traduisant une
influence certaine de l’architecture numide et des
thèmes décoratifs de la tapisserie
Auréssienne.
L’établissement s’ouvrait sur une cour
à portique en forme de la lettre "U" donnant directement sur
le cardo maximus (avenue nord-sud) constituant avec le decumanus
maximus (avenue est-ouest) les deux principales et grandes voies
partageant à partir du centre toute la cité. La
bibliothèque contenait plus de 3.000 rouleaux de papyrus
(ouvrages de l’époque) appelés volumina
placés dans des niches en deux étages
creusées dans le mur de la salle semi-circulaire. Pour
accéder aux étagères, le lecteur
gravissait trois marches d’un podium de 1,5 mètres
au dessus du plancher érigé le long du
périmètre de la salle. Outre la salle principale,
existaient également des salles sur les
côtés supposées servir à
empiler les ouvrages additionnels ou faire office de scriptoria
réservés à la copie des parchemins.
L’épaisseur du mur de fond de l’établissement dépassait de peu 1,5 mètre de sorte à réduire l’incursion de l’humidité et à éviter les moisissures, relèvent les mêmes spécialistes qui signalent que ce qui reste actuellement de la superstructure de la bibliothèque ne fournit aucune information de la méthode utilisée pour capter les sources de lumière.
Une inscription datée du début du 3e siècle immortalise le nom du mécène à l’origine de la construction de l’édifice : Iulius Quintianus Flavius Rogatianus. 400.000 sesterces soit 4.000 aureus (pièces d’or romaines) dont la valeur marchande du poids équivaut aujourd’hui à près de 600.000 dollars US (40 millions dinars) ont été ainsi offerts par cet ancien vétéran de la troisième légion militaire d’Auguste pour la construction de cet établissement.
Nombre de spécialistes estiment que le très bon état de conservation des vestiges de la bibliothèque de Timgad plaide en faveur de l’engagement d’une sérieuse opération de restauration. Un centre d’accueil touristique ou encore un nouveau musée rassemblant les ressources archéologiques menacées du site pourrait y être créé. D’autres fouilles seraient également souhaitées, selon les mêmes historiens qui signalent qu’une grande partie du secteur immédiatement adjacent à la bibliothèque n’a pas à ce jour fait l’objet de travaux d’excavation et des surprises pourraient être réservées aux futurs archéologues qui s’y lanceraient. Très récemment, le département d’archéologie de l’université de Cincinnati de l’Etat de l’Ohio aux Etats Unis a réévalué les résultats de la recherche et des fouilles effectuées au début du siècle dernier (1906) sur le site de cette bibliothèque et a proposé une restauration en 3D de cette fameuse bibliothèque.
Pendant ses années de lustre, ce lieu public de savoir ouvrait dès les premières heures de la journée jusqu’en milieu d’après-midi, période d’ensoleillement propice à la lecture. Et pareillement à une ruche, son enceinte bourdonnait des bruits sourds des personnes y lisant à voix haute, comme le veut la tradition romaine. Les joutes rhétoriques auraient été inévitables au sein de cet espace de culture tant la ville de Thamugadi était connue pour être la capitale de la secte donatiste embrassée par toute la Numidie et avoir même abrité un concile générale du donatisme en l’an 397 sous la conduite de l’évêque de la ville Gaudentius qui s’était engagé dans une vive polémique publique avec le célèbre saint Augustin, évêque catholique de Bône (Annaba).