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13 mai 2007
Journal officiel de la République Algérienne

Loi n° 07-06 du 13 mai 2007 relative à la gestion, à la protection
et au développement des espaces verts.

 

Le Président de la République,
Après avis du Conseil d'État ;
Après adoption par le Parlement ;

Promulgue la loi dont la teneur suit :
 

Article 1er. — La présente loi a pour objet de définir les règles de gestion, de protection et de développement des espaces verts dans  le cadre du développement durable.

TITRE I

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Art. 2. — La gestion, la protection et le développement des espaces verts dans le cadre du développement durable ont pour objectifs notamment :

— d’améliorer le cadre de vie urbain ;
— d’entretenir et d’améliorer la qualité des espaces verts urbains existants ;
— de promouvoir la création d’espaces verts de toute nature ;
— de promouvoir l’extension des espaces verts par rapport aux espaces bâtis ;
— de faire de l’introduction des espaces verts, dans tout projet de construction, une obligation prise en charge par les études  urbanistiques et architecturales publiques et privées.

Art. 3. — Au sens de la présente loi, on entend par :

Jardin botanique : Institution qui rassemble des collections documentées de végétaux vivants à des fins de recherche scientifique, de conservation, d’exposition et d’enseignement.
Jardin collectif
: Représente l’ensemble des jardins de quartier, les jardins des hôpitaux, les jardins d’unités industrielles et les jardins d’hôtels.
Jardin ornemental
: Espace aménagé où l’échantillon végétal ornemental prédomine.
Jardin résidentiel
: Jardin aménagé pour le délassement et l’esthétique, rattaché à un ensemble résidentiel.
Jardin particulier
: Jardin rattaché à une habitation individuelle.

Art. 4. — En vertu de la présente loi, constituent des espaces verts les zones ou portion de zones urbaines non construites et recouvertes totalement ou partiellement de végétation, situées à l’intérieur de zones urbaines, ou devant être urbanisées, au sens de la loi n° 90-25 du 18 novembre 1990, susvisée, et qui font l’objet d’un classement selon les modalités fixées par les dispositions de la présente loi en une des catégories suivantes :

— les parcs urbains et périurbains qui sont constitués par les espaces verts délimités et, éventuellement clôturés, constituant un espace de détente et de loisirs, et pouvant comporter des équipements de repos, de jeux et/ou de distraction, de sports et de restauration. Ils peuvent également comporter des plans d’eau, des circuits de promenade et des pistes cyclables ;
— les jardins publics qui sont des lieux de repos ou de halte dans des zones urbaines et qui comportent des massifs fleuris ou des arbres. Cette catégorie comprend également les squares plantés, ainsi que les places et placettes publiques arborées ;
— les jardins spécialisés qui comprennent les jardins botaniques et les jardins ornementaux ;
— les jardins collectifs et/ou résidentiels ;
— les jardins particuliers ;
— les forêts urbaines qui comportent les bosquets, les groupes d’arbres, ainsi que toute zone urbaine boisée y compris les ceintures vertes ;
— les alignements boisés qui comprennent toutes les formations arborées situées le long des routes, autoroutes et autres voies de communication en leurs parties comprises dans des zones urbaines et périurbaines.

TITRE II

DES INSTRUMENTS DE GESTION DES
ESPACES VERTS

Art. 5. — Constituent des instruments de gestion des espaces verts :

— le classement des espaces verts ;
— les plans de gestion des espaces verts.

Chapitre 1
Du classement des espaces verts

Section 1
Des conditions et modalités de classement
des espaces verts
 

Art. 6. — Le classement des espaces verts est l’acte administratif par lequel l’espace vert concerné, quels que soient sa nature juridique ou son régime de propriété, est déclaré constituer, en vertu des dispositions de la présente loi, un espace vert et est rangé dans une des catégories fixées par les dispositions de l’article 4 ci-dessus.

Art. 7. — Le classement des espaces verts comporte deux phases :

— une phase d’étude de classement et d’inventaire ;
— une phase de classement.

Art. 8. — L’étude de classement comporte :

— la caractérisation physique de l’espace vert ;
— la caractérisation écologique de l’espace vert ;
— le plan général d’aménagement de l’espace vert.

L’étude de classement doit faire ressortir notamment :

— l’importance de l’espace vert concerné pour la qualité du cadre de vie urbain ;
— l’usage de l’espace concerné en cas de risque majeur ;
— la fréquentation de l’espace vert concerné avec, pour corollaire, les mesures et moyens de sa sécurisation et de son entretien ;
— la valeur particulière des composantes des espaces verts concernés et notamment ceux dont la protection est nécessaire ;
— l’évaluation du risque de dégradation naturelle ou artificielle auquel les composantes de l’espace vert sont exposées.

Art. 9. — L’étude de classement doit également comprendre un inventaire exhaustif de l’ensemble de la végétation de l’espace vert concerné qui fait ressortir :

— les variétés végétales existantes dans l’espace vert concerné ;
— la cartographie de l’espace vert faisant ressortir les variétés végétales qui y sont implantées ;
— la cartographie de l’espace vert faisant ressortir les allées et voies de circulation éventuelles, ainsi que les réseaux d’approvisionnement en eau d’arrosage et, le cas échéant, les bassins ou plans d’eau existants.

Art. 10. — Il est institué une commission interministérielle des espaces verts chargée d’examiner les dossiers de classement des espaces verts, d’émettre un avis sur le classement proposé et de transmettre aux autorités concernées les projets de classement relevant de leur autorité.

Les modalités d’organisation et de fonctionnement de cette commission sont fixées par voie réglementaire.

Art. 11. — Le classement des espaces verts est prononcé :

Pour les parcs urbains et périurbains : par arrêté du wali sauf pour les parcs d’envergure nationale pour lesquels le classement est prononcé par arrêté conjoint des ministres chargés respectivement de l’intérieur, de l’environnement et de l’agriculture. Dans ce cas et conformément aux dispositions de l’article 24 ci-dessous, l'arrêté de classement précise l’autorité chargée de la gestion du parc concerné.

Pour les jardins publics : par arrêté du président de l’assemblée populaire communale, et par arrêté du wali pour les jardins publics situés dans la ville chef-lieu de wilaya.

Pour les jardins spécialisés : par l’autorité ayant créé les jardins spécialisés concernés ou par celle à laquelle est confiée leur gestion.

Pour les jardins collectifs et/ou résidentiels
: l’acte de classement est pris par le président de l’assemblée populaire communale concernée, sur la base des études architecturales des résidences, cités ou de tout ensemble d’habitations collectives ou semi- collectives.

Pour les jardins particuliers
: les mentions et délimitations des espaces verts, telles que fixées expressément par le permis de construire, constituent l’acte de classement des jardins particuliers ;

Pour les forêts urbaines
: par arrêté du ministre chargé des forêts.

Pour les alignements boisés et les alignements situés dans des zones non encore urbanisées :
par arrêté du ministre chargé des forêts.

Pour les alignements situés dans des zones urbanisées
: par arrêté du président de l’assemblée populaire communale.

Art. 12. — Aucun déclassement d’espace vert ne peut être opéré s’il n'a pas fait l’objet :

— d’une étude faisant ressortir l’utilité publique de l’affectation envisagée et l’impossibilité d’utiliser une assiette foncière autre que celle de l’espace vert concerné,
— l’accord de déclassement de la commission interministérielle instituée par les dispositions de l’article 10 ci-dessus. Dans tous les cas, le déclassement d’un espace vert ne peut être prononcé que par décret. Les règles et les modalités de classement des espaces verts peuvent, le cas échéant, être précisées par voie réglementaire.
 

Section 2
Des effets du classement des espaces verts
 

Art. 13. — Dès classement d’un espace vert en une des  catégories prévues par les dispositions de l’article 4 ci- dessus, selon les modalités fixées à l’article 11 de la présente loi, et sans préjudice des mesures de préservation et de protection des espaces verts prévues par la législation et la réglementation en vigueur, constituent des effets du classement les mesures de protection et de préservation fixées par les dispositions des articles 14 à 23 ci-après ainsi que les mesures particulières additives prescrites par le plan de gestion en vertu des dispositions de l’article 25 ci- dessous.

Art. 14. Tout changement d’affectation de l’espace vert classé ou tout mode d’occupation d’une partie de l’espace vert concerné est interdit.

Art. 15. — Toute construction ou infrastructure devant être implantée à une distance inférieure à cent (100) mètres des limites d’un espace vert est interdite.

Art. 16. — Toute demande de permis de construire est refusée si le maintien des espaces verts n’est pas assuré, ou si la réalisation du projet entraîne la destruction du couvert végétal.

Art. 17. — Tout dépôt de détritus ou déchets dans les espaces verts est interdit en dehors des lieux ou dispositifs affectés et désignés cet effet.

Art. 18. — Sans préjudice des autres dispositions législatives en la matière, l’abattage d’arbres sans permis préalable est interdit.

Art. 19. — Toute publicité dans les espaces verts est interdite.

Art. 20. — Outre la clôture éventuelle de certaines zones non ouvertes au public, les plans de gestion prévus par les dispositions de l’article 25 ci-dessous détermineront les cas où l’espace vert concerné devra faire l’objet d’une clôture.

Art. 21. — L’installation, dans les espaces verts urbains, de pigeonniers et d’abris confectionnés destinés à protéger l’avifaune, contribue à la protection de la biodiversité en milieu urbain.

Art. 22. — Pour les jardins particuliers, ainsi que pour les jardins collectifs et/ou résidentiels, le certificat de conformité prévu par les dispositions de l’article 75 de la loi n° 90-29 du 1er décembre1990, susvisée, ne peut être établi et délivré si les espaces verts prévus par le permis de construire n’ont pas été respectés.

Art. 23. — Hormis les cas pour lesquels la présente loi  prévoit des dispositions particulières, les forêts urbaines et les alignements boisés situés hors des zones urbanisées, au sens de l’article 11 ci-dessus, demeurent régis par la législation en vigueur notamment par les dispositions de la loi n° 84-12 du 23 juin 1984, susvisée.
 

Chapitre 2
Des plans de gestion des espaces verts
 

Art. 24. — Sous réserve des dispositions de l’article 27 ci-dessous, la gestion des espaces verts relève de l’autorité ayant procédé au classement de l’espace vert concerné.

Art. 25. — Dès son classement et après avis de la commission instituée par les dispositions de l’article 10 ci-dessus, l’espace vert concerné fait l’objet d’un plan de gestion.

Art. 26. — Le plan de gestion des espaces verts est un document technique qui comporte l’ensemble des mesures de gestion, d’entretien, d’usage, ainsi que toute prescription particulière de protection et de préservation de l’espace vert concerné, afin de garantir sa durabilité. Le contenu et les modalités d’élaboration, d’adoption et de mise en oeuvre du plan de gestion des espaces verts sont fixés selon la catégorie à laquelle ils appartiennent par voie réglementaire.

Art. 27. — Pour les jardins collectifs et/ou résidentiels, les conditions de leur gestion et de leur entretien, ainsi que les charges particulières incombant aux résidents et notamment ceux chargés de leur préservation sont fixées par voie réglementaire.

TITRE III

Du développement des espaces verts

Chapitre 1
Des prescriptions relatives au développement des espaces verts
et aux normes qui leur sont applicables
 

Art. 28. — Sans préjudice des dispositions législatives en la matière, toute production architecturale et/ou urbanistique doit intégrer et prendre en charge la nécessité de prévoir des espaces verts selon les normes et objectifs fixés par la présente loi.

Art. 29. — Pour toute conception d’espaces verts, le concepteur public ou privé est tenu dans une optique d’homogénéité et d’unité, de prendre en considération les facteurs suivants :

— le caractère du site ;
— les vues à conserver, à mettre en valeur ou celles à masquer ;
— les ressources de terrain ;
— les espèces et variétés végétales de la région concernée ;
— le patrimoine architectural de la zone ou de la région ;
— les servitudes et les contraintes liées à la mitoyenneté, au régime des eaux, au droit de passage, au bornage, aux alignements de voirie, nivellements, plantations, aux canalisations souterraines et aux installations électriques souterraines.

Art. 30. — Les emplacements réservés aux espaces verts dans les zones urbaines doivent être pris en considération lors de l’élaboration ou de la révision des instruments d’urbanisme.

Art. 31. — Il est institué en vertu de la présente loi :

— des normes d’espace vert ;
— des coefficients d’espace vert par ville ou par ensemble urbain ;
— des coefficients d’espace vert pour les habitations particulières ;
— une nomenclature des arbres urbains et des arbres d’alignement.

Les modalités d’application de cet article sont fixées par voie réglementaire.

Art. 32. — Il est institué un prix national de la ville verte. Les modalités d’application de cet article sont fixées par voie réglementaire.

Chapitre 2
Des dispositions relatives à l’usage des espaces
verts en matière de risques majeurs
 

Art. 33. — Les périmètres dégagés suite à l’effondrement de bâtisses, en zones urbaines ainsi que les zones urbaines grevées de servitudes non ædificandi après traitement des raisons qui ont conduit à les soumettre aux contraintes sus évoquées, sont utilisés en priorité en espaces verts.

TITRE IV

Des dispositions pénales
 

Art. 34. — Sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions de la présente loi les officiers et agents de police judiciaire et les fonctionnaires dûment mandatés, agissant en vertu des pouvoirs qui leur sont conférés par les lois et règlements en vigueur.

Art. 35. — Toute infraction aux dispositions de l’article 14 de la présente loi est punie d’un emprisonnement de six (6) mois un (1) an et d’une amende de cinquante mille dinars (50.000 DA) à cent mille dinars (100.000 DA) et de la remise en l’état des lieux.
En cas de récidive, la peine est portée au double.

Art. 36. — Toute infraction aux dispositions de l’article 17 de la présente loi est punie d’une amende de cinq mille dinars (5.000 DA) à dix mille dinars (10.000 DA).

Art. 37. — Toute infraction aux dispositions de l’article 18 de la présente loi est punie d’un emprisonnement de deux (2) à quatre (4) mois et d’une amende de dix mille dinars (10.000 DA) à vingt mille dinars (20.000 DA). En cas de récidive, la peine est portée au double.

Art. 38. — Toute infraction aux dispositions de l’article 19 de la présente loi est punie d’un emprisonnement de un (1) à quatre (4) mois et d’une amende de cinq mille dinars (5.000 DA) à quinze mille dinars (15.000 DA).
En cas de récidive, la peine est portée au double.

Art. 39. — Est puni d’un emprisonnement de trois (3) à six (6) mois et d’une amende de vingt mille dinars (20.000 DA) à cinquante mille dinars (50.000 DA) quiconque se rend responsable de la dégradation des espaces verts à et d’arrachage de jeunes plants.

Art. 40. — Est punie d’un emprisonnement de six (6) à dix-huit (18) mois et d’une amende de cinq cent mille dinars (500.000 DA) à un million de dinars (1.000.000 DA) toute personne qui détruit volontairement tout ou partie d’un espace vert avec intention de s’emparer des lieux et de les affecter à une quelconque autre activité.
En cas de récidive, la peine est portée au double.

TITRE V

Des dispositions finales
 

Art. 41. — Sont abrogées toutes les dispositions contraires aux dispositions de la présente loi notamment celles de l’article 65 de la loi n° 03-10 du 19 Joumada El Oula 1424 correspondant au 19 juillet 2003, susvisée.

Art. 42. — La présente loi sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

Fait à Alger, le 13 mai 2007.

                                   Abdelaziz BOUTEFLIKA.


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